Histoire de la FFE (de 1921 à 2009)
19/02/2021
Article publié en mars 2009 dans la Revue Échec et Mat, et rédigé par Vincent Moret, que nous remercions de nous avoir autorisé à reproduire ici son article.
Après plusieurs avortements, dont un en 1914 en raison de la guerre, la Fédération Française d'Echecs a vu officiellement le jour le 19 mars 1921, dans une brasserie parisienne.
Henri Delaire (photo), directeur de la revue " La Stratégie " en devient le premier président. Il abandonne cependant vite ses fonctions et est remplacé dès 1922 par Fernand Gavarry, ancien ministre de la République et directeur des Affaires étrangères. Dès sa prise de fonction, le nouveau président lance un appel à tous les joueurs d'échecs français.
"Le but de notre Fédération est de tenter modestement et dans la mesure de ses ressources exiguës, de grouper les cercles d'échecs et les joueurs isolés, et de créer un organe central pour relier entre eux tous les éléments échiquéens de France et de ses colonies. Aidez-nous en vous affiliant !"
Dans la revue de la Fédération Française d'avril 1923, Gaston Legrain, le secrétaire administratif, par ailleurs auteur des célèbres Cahiers de l'échiquier Français, donne un premier bulletin de santé du bébé, avec son style inimitable :
"La FFE vient d'atteindre sa 3e année d'existence. Notre enfant est venu au monde un peu souffreteux, parmi l'indifférence générale. Nous avons un instant craint pour ses jours. cependant, gràce aux soins dévoués dont il a été entouré, le voilà aujourd'hui sain et sauf. Il est sorti du maillot, se tient sur ses jambes, élève la voix et dit papa très gentiment en tendant les bras vers MM. Delaire et Gavarry. Nous comptons sur ses nombreux parents pour lui fournir des joyaux en abondance et lui garnir son trousseau. Du reste, les amateurs et les cercles s'empressent autour de son berceau et l'alimentent si bien de leur cotisation que, sans être comparable à son cousin, le gros gaillard anglais, il prend de la chair et commence à s'arrondir."
1.500 licenciés
Mais les efforts de Fernand Gavarry et de Gaston Legrain, associés aux efforts de Pierre Vincent qui fonde la FIDE en 1924 à l'occasion des Jeux Olympiques de Paris, restent peu couronnés de succès en nombre de licenciés. On dénombre une trentaine de clubs officiels pour à peine 1.500 membres au total. De plus, le bureau fédéral est désespéré par l'incapacité chronique à équilibrer les bilans financiers. Un problème récurrent auquel auront à faire face bon nombre de présidents.
Dans le bulletin fédéral de 1928, Pierre vincent lance un dernier appel, aussi inutile que pathétique :
"Nous sommes à la veille d'interrompre notre effort parce que les cotisations ne rentrent pas et nos fonds sont pratiquement épuisés. Les cinq dernières années de mendicité perpétuelle nous ont profondément lassés. La FFE n'a pas besoin en ce moment d'un apôtre. Il lui faut un financier. A qui la main ?"
Dans la foulée, le bureau démissionne en bloc et " laisse la place à qui la voudra ", persuadé qu'il n'y aura pas de repreneur et que la FFE aurait vécu.
Mais le miracle a lieu. Léon Tauber (photo), directeur de plusieurs palaces parisiens et grand mécène, reprend la Fédération en mettant quelques centaines de francs sur la table et crée une nouvelle équipe dirigeante. En nommant notamment Alekhine, qui venait de remporter son championnat du monde contre Capablanca, délégué français à la FIDE.