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Boris Spassky nous a quittés   

06/03/2025

Boris Spassky, champion du monde d'échecs de 1969 à 1972, est mort le 27 février 2025. Légende des Échecs, il s'était installé en France en 1976 et avait été naturalisé en 1978. Boris Spassky avait ensuite joué pour l'Équipe de France lors du Championnat du monde 1985, et lors des Olympiades en 1984, 1986 et 1988. Il a également participé au Championnat de France à deux reprises, en 1990 et 1991. Son nom est souvent associé au match du Siècle de 1972, durant lequel il s'est incliné devant Bobby Fischer, mais la carrière du champion ne peut être résumée à cette défaite lors du choc avec l'Américain resté dans les mémoires.

Jérôme Maufras vous raconte l'histoire de ce grand champion :

Un train cisaille la campagne russe en deux. Il a quitté Léningrad, assiégée par la Wehrmacht. À son bord, la population de la ville qu'on évacue vers le district de Kirov. Parmi cette population apeurée, un jeune garçon apprend le déplacement des pièces du jeu d'échecs. Il s'appelle Boris Vasilievich Spassky. Il a cinq ans. Né en 1937 d'un père ingénieur et d'une mère paysanne, il a tout du jeune Soviétique des années 1940. Il a aussi tout de l'enfant prodige. En 1947, il se fait remarquer en battant Mikhail Botvinnik au cours d'une simultanée. À 18 ans, il devient champion du monde junior à Anvers et se voit octroyer le titre de GMI, un record de précocité pour l'époque. Rien ne semblait pouvoir entraver la progression du jeune homme. Il connut cependant une mauvaise période à la fin des années 1950. Eclipsé par l'éclosion de Tal et Petrossian, il essuya des revers dans les tournois zonaux. Il décida alors de remplacer son entraîneur Tolouch par Bondarevski.

La marche en avant pouvait reprendre : Boris Spassky remporta le championnat d'URSS en 1961 et se qualifia pour l'interzonal en 1964 à Amsterdam puis pour le Tournoi des candidats de 1965. Il y élimina Keres, Geller, Tal et obtint le droit de défier Petrossian une première fois en 1966. Spassky échoua de peu mais dut baisser pavillon face à l'Arménien. Il aurait sa revanche 3 ans plus tard. En 1969, les deux hommes se rencontrèrent à nouveau. Alors qu'ils étaient à égalité 8 à 8, Spassky décida de se séparer de son entraîneur pour gagner en indépendance. Un choix stupéfiant mais payant : il se détacha irrésistiblement dans les dernières parties du match et l'emporta avec deux longueurs d'avance. Boris Spassky était le meilleur joueur du monde. De fait, c'est lui qui eut le redoutable honneur de jouer le match du siècle contre Bobby Fischer à Reykjavik en 1972. Battu sans contestation par l'Américain, Boris Spassky souffrit rapidement de la rancœur à peine voilée des autorités soviétiques. Champion d'URSS une dernière fois en 1973, la vie de Spassky prit un nouveau tournant en 1974 quand il rencontra une Française d'origine russe, Marina Stcherbatcheff, qui travaillait pour l'office du commerce à l'ambassade de France. Quand les autorités soviétiques demandèrent à la Française de quitter le territoire, Spassky obtint un visa et la suivit. Ils s'installèrent à Meudon.

Spassky continua à jouer et à gagner. Il se qualifia pour la finale des candidats en 1977, participa encore à ce tournoi des candidats en 1980 mais ne parvint plus jamais à se qualifier pour disputer le titre suprême. Il brilla cependant encore en tournoi, remportant notamment le tournoi de Linares en 1983 et jouant pour l'équipe de France au cours de plusieurs Olympiades.

Sur l'échiquier, Spassky peut être entreprenant, mais aussi prudent : il peut être « généreux » avec les pièces, mais aussi économe ; il peut jouer par intuition, mais aussi en calculant précisément les variantes… En résumé, il est un immense champion.